Un membre de Malte

Version imprimableVersion imprimable

Un membre de Malte à la Vraye Croix d'Aiguebelle

Débordons un peu les limites de  Chamoux, vers ses confins Est, du côté de la Croix d'Aiguebelle de Bourgneuf.

Qui sait encore que les Templiers, puis l'Ordre de Malte, ont possédé à "la Vraye Croix d'Aiguebelle" une antenne de leur Commanderie de Chambéry - ce que l'on appelait alors "un membre" ?

Il nous faudra faire preuve de prudence, car partout, on a  rêvé sur la présence des Templiers, puis des Hospitaliers de St-Jean de Jérusalem, dits "Chevaliers de l'Ordre de Malte" après leur installation dans cette île au large de la Sicile… et de l'actuelle Tunisie ; même les érudits se sont parfois laissé emporter, sans beaucoup de preuves.
Mais enfin, c'est certain, car on a tout de même des documents authentiques : il y eut un "membre" de la Commanderie de Chambéry à "La Vraye Croix d'Aiguebelle".

En revanche, cette page a-t-elle sa place dans un chapitre "Sanctuaires" ? C'est moins sûr:
- oui, Malte a eu sa chapelle "de la Vraie Croix" à Aiguebelle. Mais si petite... Un oratoire plutôt. Le membre de la "Vraie Croix d'Aiguebelle" valait surtout pour ses revenus. Qui n'étaient pas très importants, quoiqu'en aient dit certains érudits, qui firent la légende!
 

en travaux

Où ?

Mais où était ce membre exactement ? C'est une autre histoire !
Car le territoire de la Croix d'Aiguebelle a connu un traitement particulier, entre Bourgneuf et Aiguebelle.

La Croix d'Aiguebelle, un territoire intermédiaire

Pourquoi "Croix d'Aiguebelle" ? La Croix a-t-elle toujours été attachée à Bourgneuf ?
D'abord, le nom même de cette langue de terre à la position stratégique entre l'Arc et la montagne, à l'entrée de la Maurienne, nous parle d'Aiguebelle, et non de Bourgneuf.
Et on connaît l'existence la chapelle des Chevaliers, dite "de la Vraye Croix" à l'entrée d'Aiguebelle côté Bourgneuf (voir Mappe).

En 1728, lorsque les géomètres dressèrent la Mappe, ils représentèrent la Croix d'Aiguebelle sur la Mappe de Bourgneuf. MAIS... en recommençant la numérotation des parcelles à 1, comme si ce territoire si particulier, était en partie autonome.
Au XIXe siècle, après les premiers grands travaux d'endiguement de l'Arc, ceux de la Croix ont souhaité un moment être détachés de Bourgneuf, et rejoindre Aiton1.

Demande faite par le hameau de la Croix-d'Aiguebelle pour obtenir son annexion à la commune d'Aiton (…) Les Conseils de Bourgneuf, d'Aiton et d'Aiguebelle ont été entendus. — Bourgneuf s'oppose naturellement à la séparation demandée par le hameau de la Croix ; Aiton y adhère, à condition que l'annexion pour le temporel amène également celle pour le spirituel. Aiguebelle adhère également, car elle étendrait ainsi son territoire et n'aurait qu'à y gagner (p. 31: )
La Croix-d'Aiguebelle aurait dans un temps ancien formé une commune séparée de celle de Bourgneuf, dépendant même d'une juridiction différente,(…) Mais il pense que, malgré l'éloignement de l'église, il y a eu dans le temps de bonnes raisons pour le réunir définitivement à Bourgneuf (p. 295: )

Et pourquoi "la Croix d'Aiguebelle" ?

Les érudits de la SHAM remarquent dans notre vallée l'existence de 2 villages nommés "La Croix…" : la Croix d'Aiguebelle, et la Croix de la Rochette. Pour eux, pas de doute, ces "Croix" marquaient des ruptures - voire des frontières - entre 2 territoires. Là, pas de problème, ce "village" répond bien à l'hypothèse, développée  dans l'introduction du  Décanat de Val Penouse de Félix Bernard (et dans un article sur Aiguebelle, voir note 2):

Limites du Décanat
Les lieux dits La Croix indiquent souvent une limite importante. La Croix-d'Aiguebelle est ainsi appelée parce qu'elle est proche d'Aiguebelle, sans lui appartenir. Elle fit toujours partie de la paroisse de Notre-Dame de Bourgneuf, qu'il est naturel d'identifier avec cette paroisse de Sainte-Marie de Conflenz, citée en 1014 comme formant avec les paroisses de Saint-Jean d'Albigny, de Saint-Pierre d'Albigny et de Châteauneuf-sur-Isère ses voisines un groupe de propriétés royales ou corles  . À la frontière de cette « terre du roi » rappelée en 1036, le village de La Croix nous indiquerait l'existence d'une croix-limite sur son territoire. Et c'est sans doute à son extrémité proche d'Aiguebelle, et non pas en aval, où les Templiers eurent une halte ou « membre » dit de La Vraie Croix.
Ainsi La Croix-d'Aiguebelle devait séparer la province Viennoise et celle des Alpes Cottiennes. Elle semble même avoir divisé le diocèse des Gaules de celui d'Italie, vers le milieu du IVe siècle. Car la Notice des Gaules qu'il faut dater de 395-407 rattache les Alpes Cottiennes au diocèse d'Italie avec Milan pour capitale.

Mais où se situaient donc les biens des Chevaliers ?

Là, ça se complique…

Une fausse piste très tentante…
Sur la Mappe de 1728
, où La Croix d'Aiguebelle est représentée avec Bourgneuf, mais dotée d'une numérotation à part des parcelles, on ne trouve aucun bien relevant de la Commanderie de Chambéry.
Et pourtant, Jacques Balmain, un autre érudit de notre vallée, pensait reconnaître dans une importante maison de la Grande Croix (tout près des limites de Chamoux!) le "siège" de l'antenne de la Commanderie de Chambéry.

Blottis dans les noyers, se devinent deux petits villages, ils s'appellent respectivement la Petite-Croix-d'Aiguebelle ou la Vraie-Croix et la Grande-Croix-d'Aiguebelle ou Croix-d'en-Haut.
Ces deux groupes de maisons, aujourd'hui rattachés à la commune de Bourgneuf, se trouvent placés sur la route d'Italie, et occupent ainsi à l'entrée même de la vallée de Maurienne une place particulièrement importante surtout à une époque où les voyages étaient lents et rendus dangereux par les routiers sans nombre qui passaient sans cesse en Savoie, se rendant de France en Italie ou vice-versa.
C'est à cette situation que l'on doit attribuer l'établissement dans ce lieu d'une commanderie de Saint-Jean du Temple de Jérusalem.
La commanderie existe toujours, au moins en partie, en amont du village de la Petite-Croix-d'Aiguebelle, entre la route et la montagne. C'est un grand bâtiment de ferme flanqué de tours démantelées que recouvre un toit moderne. En face de ce bâtiment, et de l'autre côté du chemin, s'élevait une chapelle qui dépendait dd cette commanderie. Depuis la Révolution, elle servait de hangar à la commune de Bourgneuf. En 1887, la susdite commune [de Bourgneuf], voulant doter la section de la Croix-d'Aiguebelle d'une école, adapta les restes de cette chapelle à ce nouvel usage.

D'emblée, les connaisseurs auront repéré quelques erreurs. Confusion entre la Petite et la Grande Croix.
Erreur de dénomination : la Commanderie à proprement parler était à Chambéry. On parlerait plutôt de maison ?
Et puis… sur la Mappe2 de la Croix d'Aiguebelle, lieudit "La Tour", parcelles 40 à 42, 4 tourelles donnent en effet à un grand bâtiment une allure fortifiée, toute militaire… Mais la Mappe utilisait des conventions de représentation, il n'est pas prouvé que les 4 tourelles existaient. Et surtout…

Alors que J. Balmain situe là - sans rien prouver - le siège du "membre" de la Croix d'Aiguebelle, le Tabelle-minute2 nous dit qu'en 1728 (alors que l'Ordre est actif), ce bâtiment et les terres bien regroupées alentour, appartiennent à un particulier, Claude François FRELAY (ou Ferlay?)

Notons cependant que pour J. Balmain, comme dans les débats évoqués ci-dessus, les deux "villages" n'auraient pas toujours été attachés à Bourgneuf. Alors que selon F. Bernard (in Le Décanat… déjà cité) Bourgneuf et les 2 villages "de la Croix d'Aiguebelle" ont toujours été liés.
Et… En contradiction avec la Mappe de 1728, Balmain assimile ''La Petite-Croix-d'Aiguebelle" et "la Vraie-Croix" (mais sur quelles preuves ? Et quelle est pour lui la "Petite-Croix" ?)
 

Les biens de l'Ordre de Malte à la Vraye Croix d'Aiguebelle.

Interrogeons à nouveau le Tabelle-minute lié à la Mappe de 1728.

Nous l'avons dit, on ne trouve aucun bien, sur Bourgneuf et la Croix d'Aiguebelle actuelle.
(Insistons sur le mot actuelle : nous ne savons rien des limites anciennes de ce lieudit, qui venait peut-être autrefois aux confins d'Aiguebelle ? Ce qui expliquerait bien des choses.)
En revanche, des biens "de l'Ordre de Malte" existaient à Montgilbert.
Et nous découvrons sur la Mappe d'Aiguebelle, côté La Croix d'Aiguebelle,  un peu de terre et une chapelle: voilà qui est intéressant ! Et authentique

Nous relevons :

Montgilbert

Propriétaires Statut Mas Nature degré / bonté surface
1 MALTE La Commanderie Ecclésiastique Noyer Goytron Champ (avoine) 3 1764 m2
2 MALTE La Commanderie Ecclésiastique Noyer Goytron Bois broussailles et châtaigneraie 3 17119 m2


Aiguebelle

Propriétaires Statut Mas Nature degré / bonté surface
10 MALTE Chevalier Noble la Vrai Croix Marais 1 19019 m2
11 MALTE Chevalier Noble la Vrai Croix Chapelle 1 48 m2



 

 

Par ailleurs, on sait qu'il exista un "fief" des Chevaliers de Malte à La Vraie Croix d'Aiguebelle, que le Commandeur de Chambéry dut défendre au début du 18e siècle (cf Mémoire présenté au nom du chevalier de Mongonthier titulaire de la commanderie de St-Jean du Temple de Chambéry, à cause du fief dit de la vraie Croix, d’Aiguebelle. AD073 1Mi 258 ou 4num 254).
L'érudit Max Bruchet publia en 1908 un gros travail4 de relevé sur l'estimation de la valeur des biens de l'Ordre de Malte (AD Rhône), en vue des affranchissement de fiefs; pour la Commanderie de Chambéry, nous lisons, concernant des paroisses environnantes :

page Propriétaires paroisse évaluation (en livres) date de l'évaluation
347 Ordre de Malte Chamousset 700 l. 1792
350 Ordre de Malte Châteauneuf 12 l. 1792
360 Ordre de Malte Croix-d'Aiguebelle et Bourgneuf 30 l. 1792
396 Ordre de Malte Montgilbert (voir plus bas) 1300 l 1792
412 Ordre de Malte St-Alban (il pourrait s'agir de St Alban des H.) 4 l. 1791

 

 

 

 

 

 

Vint donc le temps du rachat des fiefs…

Ratification faite par les procureurs de la communauté de Montgilbert
de l'affranchissement du fief de Malthe - £ 1300

L'an 1792 et le 17 mai à Aiguebelle, à trois heures après-midi dans mon étude, par devant moi notaire royal, le secrétaire de la communauté de Montgilbert soussigné, présents les témoins enfin nommés,
ont comparu Jacques feu Jean [Battatin] et François feu Bernard Buet, tous deux natifs et habitants de la paroisse de Montgilbert,
lesquels, en qualité de procureurs généralement institués de ladite Communauté pour l'affranchissement du fief,
ainsi que par acte du 13 avril 1783 reçu par mois secrétaire,
étant instruits que la Commanderie de Malthe en la personne de Messire Joseph de [Boudon] Commandeur de St-Jean du temple de Chambéry, le commissaire général de son ordre en Savoie,
a affranchi, à l'acceptation de Me François Louis Vernier, autre procureur de ladite communauté, tous les servis de droits seigneuriaux rière icelle,
pour le prix de 1300 livres payables dans deux ans avec intérêt dès la Saint-Michel dernière,
ainsi que par acte du 28 avril dernier reçu par Me Arnaud notaire, lequel étant avantageux à la Communauté en voulant icelui entretenir, de gré,
lesdits procureurs déclarent l'avouer et approuver,
en faveur de ladite commanderie et à l'acceptation de moi notaire,
dans tout son contenu, suivant sa forme et de teneur,
veulent et consentent qu'il porte son plein et entier effet, tout comme s'ils avaient [assisté] à icelui, sous promesse de l'observation et faire observer, aux peines de tous dépens, dommages, intérêts, à l'obligation et constitution des biens présents et futurs de ladite Communauté.

Fait et prononcé en présence de Pierre André et Jean-Claude André, syndic et conseiller de ladite Communauté, d'où ils se sont natifs, habitants, témoins requis, tabellion deux livres cinq sols,
ledit Buet et les témoins ont signé ; ledit [Battatin] illétéré - de ce enquis -, a fait sa marque sur la minute de moi, notaire soussigné, qui ai la présente expédié pour l'Insinuation, contenant sur une minute une page.                   Hector Brunier

AD073      2C 2196   F° 441  p.  83

En fait, le rachat ne dut pas coûter très cher aux communiers de Montgilbert, puisqu'en 1794, les biens de l'Ordre étaient nationalisés. En effet le 22 fructidor An 2, le Directoire du district prend note d'une lettre de la Commission en date du 15 du même mois, "relative à la vente des Biens de l'Ordre de Malte ordonnée par décret du 13 pluviose dernier."

L 29 1793-94 An 2-3

Nous retrouvons dans le tableau ci-dessus l'ambiguïté : de quelle paroisse, et aussi, de quel(s) fief(s) La Croix d'Aiguebelle étudiée ici en 1908, dépendait-elle jusqu'en 1792 ?

À noter par ailleurs, pour ce bâtiment flanqué de tourelles avec ses terres, qui formaient donc un fief à la Grande Croix d'Aiguebelle :

page Propriétaires paroisse évaluation (en livres) date de l'évaluation
360 Ferlay Croix-d'Aiguebelle et Bourgneuf 800 l. 1791





On remarque les énormes disparités dans l'évaluation des biens de Malte, d'une paroisse à une autre.

La différence dans la surface et la qualité des biens n'explique pas tout.
Il faut peut-être intégrer là les dégâts subis par Aiguebelle, sur une voie stratégique, aux 16, 17 et 18e siècles. Max Bruchet note d'ailleurs que la Croix d'Aiguebelle fit partie des 11 communes de Savoie-Propre (sur 206 communautés) qui, ayant fait la démarche de l'affranchissement, n'avaient pas pu rembourser du tout les seigneurs et ecclésiastiques possesseurs des fiefs.

M. Niepce dans un ouvrage sur le Grand-Prieuré d'Auvergne signale que déjà lors d'une visite de l'Ordre en 1641-1642, " le membre d'Aiguebelle possédait des terres, des prés et des rentes ; que la chapelle, dédiée à la Vraie-Croix, nom sous lequel on désignait souvent le membre lui-même, avait été «ruinée par les gens de guerre » 5

 
La chapelle a dû être remise en état, puisqu'en 1688, Eustache Crusilliat,« bourgeois d'Aiguebelle », lègue à la chapelle de la Vraie Croix la somme de cent cinquante florins monnaie de Savoie,

mais il veut et entend que le revenu ne soit perçu que par un maître d'école ecclésiastique «deument examiné par Monseigneur ». Comme premier recteur, il désigne Révérend Ginet de Montailleur «maistre d'escolle à Aiguebelle ».6

On peut se demander si la chapelle de la Vraie Croix était encore possession de l'Ordre de Malte (en principe, les biens de Malte étaient indépendants du Pouvoir, et de l'évêque)

Elle est réparée en 1731 7 (AD069-H437)

Mais après l'occupation espagnole, la chapelle "de la Vraie Croix" est ruinée : elle a servi d'entrepôt.
En 1748, le sieur Bertrand constate dans un certificat

"le mauvais état de la chapelle du Temple de St-Michel en Maurienne, et de l'oratoire d'Aiguebelle, qui ont servi de corps de garde aux troupes espagnoles" 7(AD069-H521)

Les maisons aux alentour ne valent guère mieux:

"Dans une note concernant des corvées pour la réparation et la vidange du grand fossé tendant du Rapillion au pont de la Miettaz, vers Montgilbert, et du grand chemin partant de la chapelle de la Vraie-Croix au même pont, j'ai trouvé que le nombre des faisant feu en janvier 1732 n'était que 90 ; celui des forains, ou étrangers, de 50 ; ce qui représente très approximativement une population de 600 à 700 habitants.
Point de statistique qui prouve qu'entre la guerre de 1690, celle de 1713 par Louis XIV et celle de 1742 par les Espagnols, AiguebeIIe n'avait pas assez eu de trente ans pour que sa population pût regarnir les vides ouverts par les boulets, les maladies, les incendies, l'épouvante et l'émigration.
Si Victor-Amédée avait renouvelé les mesures bienfaisantes que contenaient les lettres-patentes du 20 mars 1618, données par Charles-Emmanuel, elles auraient eu une application aussi salutaire, aussi méritée en 1748 qu'en 1618."
8

Un membre de la Commanderie de Chambéry

Des Templiers à l'Ordre des Hospitaliers de Jérusalem, dit plus tard "Ordre de Malte"

Des moines-soldats
Soyons clairs : les Templiers, puis les Chevaliers de St-Jean de Jérusalem, étaient d'abord des moines-soldats: leur raison d'être se trouvait à Jérusalem, où au fil des nombreuses Croisades, et entre les Croisades, Chrétiens et Musulmans s'affontèrent pour la possessions des Lieux Saints.
(Et un peu plus... certains se taillèrent de beaux fiefs sur les côtes de Mditerranée orientale).

Mais les moines-soldats étaient de "vrais" moines, qui prononçaient des vœux, restaient célibataires, et vivaient en principe chichement. (Il y eut des exceptions : le marquis de Lescheraines, Grand Prieur de la "langue d'Auvergne" - dont la Savoie faisait partie - au 18e siècle, vécut en seigneur ; un inventaire après son décès… à Chambéry, ne laisse aucun doute sur son train de vie 7 (AD069-H520)); mais... les biens d'un Chevalier allaient à l'Ordre après sa mort.
La présence des Chevaliers en Europe avait pour but principal, la récolte incessante de finances pour la confrontation avec les guerriers musulmans. Rois et papes les soutenaient en leur accordant d'importants privilèges.

En Terre Sainte, deux Ordres intervenaient, parfois en concurrence : les Templiers, et les Chevaliers de St-Jean de Jérusalem. Puis, en 1312-1313, les Templiers - trop puissants - furent dissouts (et brûlés) par Philippe le Bel. Leurs biens furent remis aux Hospitaliers de St-Jean de Jérusalem, plus tard appelés "Ordre de Malte".

Des rejetons de vieilles familles nobles
Autre particularité de ces moines-soldats : Les Chevaliers devaient "faire leurs Preuves" de noblesse, et il fallait de nombreux quartiers pour entrer dans l'Ordre.


Une organisation pyramidale

(nous ferons vite : il existe des pages bien documentées sur Internet  ce sujet)
À la tête de l'Ordre de St-Jean de Jérusalem, il y avait un Grand-Maître (à Malte)
Il chapeautait plusieurs grandes régions en Europe, dites "Langues" puisqu'elles étaient fondées sur les particularités linguisitques. Chaque Langue avait à sa tête un Grand Prieur, qui gérait des Commanderies.
En Savoie-Propre, la Commanderie se trouvait à Chambéry. Elle dépendait de la Langue d'Auvergne.
Elle veillait à son tour sur les biens d'une dizane d'antennes dites "membres", souvent confiées à des "fermiers", qui assuraient la gestion de biens contre une somme convenue à verser au Commandeur.


La Vraie Croix d'Aiguebelle, les Templiers et les Chevaliers de l'Ordre de Malte

La Vraie Croix d'Aiguebelle est déjà attestée comme site des Templiers XXXX

Liste des membres de la Commanderie de Chambéry de l'Ordre de Malte:

1641-1642 visites - Commanderie de Chambéry - Membre « du Thovet », Membre d’Aiguebelle « autrement de la vraie Croix », Membre du Temple Saint-Michel en Maurienne, Membre de «l’Hôpital Saint Jean dessous Conflans» (Albertville), Membre d’Allevard, Membre d’Acoyeu (près de Belley), Membres de Mesaige du mandement de Vigile (Vizille); de Valey et Vardotte ; de Romeran avec ses dépendances qui sont saint-Jean de Plout et Saint-Jean de Bard, de Serguene au pays de Valay, Pontcharra » (AD069 - H 142)

1674- CHAMBERY, Accouyeux, Ayguebelle ou la Vraye Croix, Allevard et Pontcharas, l’Hospital de Conflens (Albertville), Mesages et Vigile (Vizille), Monmeillant, St-Michel de Morienne, St-Jean-de-Plomb, St-Jean de Romeran, Sergueve (AD069 - H 700, ff. 198-213)

1772-1775  Visites par les commandeurs - commanderie de Chambéry :   membres du Touvet, d’Allevard, d’Aiguebelle, de St Michel, de Mézage, de Lavoir, du Goulet, d’Accoyeux, du Colombier, de la Tuillière (AD069 - H 179 f°33)
 

Vocations des Commanderies et de leurs membres

En Europe, les Chevaliers, souvent vieillissants, assuraient encore 2 missions :
- récolter des fonds pour financer les conflits en Terre Sainte et en Méditerranée ;
- et porter aide aux voyageurs sur les grandes routes d'Europe.
Ils géraient donc une série "d'Hôpitaux", souvent réduits à 3 ou 4 lits pour le simple accueil des voyageurs, à qui l'on servait aussi une soupe…

Aiguebelle était déjà pourvue d'un hôpital depuis le XIIIe siècle, et tout près - sur cette route fréquentée-, des maladredries et léproseries s'occupaient des voyageurs en détresse. Le membre de la Croix d'Aiguebelle n'eut peut-être pas vocation à soigner.
En revanche, la plupart des Commanderies et des Membres étaient pourvus en biens fonciers, qu'ils "louaient" à des "fermiers" : les revenus étaient recueillis, vérifiés, et transmis au "siège" à Malte.

On peut lire (aux Archives à Lyon) un "certificat des fermiers d'Aiguebelle constatant qu'ils ont joui sans trouble de leur ferme jusqu'au jour où Pierre Cordel a creusé un fossé sur les terres de la Commanderie - en 1736 7 (AD069-H467)

Pour terminer - ou plutôt, pour relancer la recherche :

Gràce au répertoire des Archives de Malte conservées aux Archives départ. du Rhône (Série H), nous avons pu repérer les noms d'un certain nombre de Commandeurs de Chambéry.
On peut consulter la liste ici ou ci-dessous (fichier attaché).
Mais... il faut encore aller à Lyon pour consulter les documents.

nov-déc 2018 - Recherche et transcription A.Dh.


notes:
1-Sécession : Compte-rendu des délibérations du Conseil divisionnaire de Chambéry. Session du 9 au 15 novembre 1858 Sur Gallica.fr
2- 2 villages nommés "La Croix…" :

- voir: Le Décanat de Val Penouse - Félix Bernard Gallica - Mémoires de l'Académie des sciences, belles-lettres et arts de Savoie -1931 sur Gallica
- voir Les groupes d'églises dans l'ancien diocèse de Maurienne par F Bernard (Bulletin 1927 de la SHAM,  dans l'article Excusion à Aiguebelle, SER2, T7, PART 1 sur Gallica)
3- Mappe (en ligne) et Tabelle-minute : AD Savoie
4- Affranchissements : L'abolition des droits seigneuriaux en Savoie (1761-1793) par Max Bruchet, 1908 (en ligne sur Gallica/fr)
5-cf Travaux de la Société d'histoire et d'archéologie de la province de Maurienne : bulletin 1894 (SER2,T1,PART1) p. 188 (Gallica.fr)
6- Travaux de la Société d'histoire et d'archéologie de la province de Maurienne : bulletin 1911 (SER2,T5)-1914. LES ÉCOLES AU XVIIe SIÈCLE - Aiguebelle en ligne sur Gallica.fr

7- AD Rhône, Série H - Répertoire Archives ecclésiastiques - Inventaire des Archives départementales du Rhône par Georges Guigue, publié en 1895 consultable en ligne
8- in: Monographie historique de la Basse Maurienne en Savoie, par Camille-Gabriel Foray, SHAM 1894, en ligne sur Gallica.fr

 


 

Fichiers attachés: