1839 Achat du Clos

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En juin 1839, la Fabrique de Chamoux achète pour y faire une école, un bâtiment et ses jardins, que nous connaissons encore : c'est "le Clos", dans l'actuelle rue Saint Joseph (on comprendra bientôt la raison de ce nom).
Nous connaissons l'acte de vente passé chez le notaire Belleville (1er document), mais aussi, tous les échanges que ce projet a suscités entre la Fabrique de Chamoux et St-Jean de Maurienne, puisque l'évêque était l'autorité de référence dans ce projet d'école (documents suivants).

"Vente par M. Joseph Guillot
En faveur du Conseil de fabrique
de la Commune de Chamoux
à l’acceptation de Rd Charles Amédée Bois
entre Sr Joseph Ramel, Ambroise Petit,
Théodule Plaisance, Claude-Antoine Martin
Et Sr Pierre Finas, membres dudit Conseil

L’An mil huit cent trente-neuf, et le neuf du mois de juin, à cinq heures après-midi à Chamoux, dans le presbytère,
Par-devant moi, Michel-François Belleville, notaire Royal soussigné, de résidence en cette Commune, assisté des témoins ci-après nommés, ont comparu
D’une part, M. Joseph à feu Joseph Guillot, propriétaire et percepteur des contributions, né et domicilié en cette Commune,
D’autre part, Rd Charles Amédée fils de vivant Sr Claude Bois, archiprêtre et recteur de cette Commune où il habite, né à St André en Maurienne, et M.M. Joseph à feu Bernard Ramel, Ambroise à feu Joseph Petit, Théodule à feu Claude-François Plaisance et Claude-Antoine à feu Joseph Martin, celui-ci né au Bourget en l’Huille, Plaisance à Montendry, les autres à Chamoux où tous habitent, composant ensemble le Conseil de fabrique de cette paroisse.
Et encore M. Pierre à feu Sr Jean-François Finas, propriétaire rentier à St Pierre de Soucy, domicilié en cette Commune en qualité de Curateur spécial à l’hoirie de défunte Marie Hudry, veuve Jaime, à forme de l’acte émané de la judicature de ce Mandement, sous date du vingt-sept juin mil huit cent trente-huit, insinué au bureau de la Rochette le vingt-trois juillet suivant, au droit de trois livres quatre-vingt-sept centimes.
Lesdites parties ont expliqué que par son testament du vingt-un juin mil huit cent trente-huit, Ulliel notaire, insinué eu bureau de la Rochette le cinq juillet suivant, au droit de cinq livres cinq centimes, dans [les volontés] duquel elle est décédée, ladite dame Jaime a institué pour héritier le Trésorier du Conseil de fabrique de cette Commune, à la charge par lui d’établir au chef-lieu une école pour l’éducation des filles de la paroisse, dirigée par une ou deux sœurs ou dames de St Joseph.
Que pour se conformer à ces dispositions, ledit Conseil de fabrique s’est pourvu à S.G. Monseigneur l’Évêque de Maurienne pour obtenir les autorisations nécessaires, tant pour l’acceptation de ladite succession que pour l’acquisition de l’immeuble ci-après désigné, ce qui a été accordé par ordonnance de S.G. sous date du dix-huit Avril dernier.
La requête et provision contenant huit pages sur quatre feuillets seront annexées au présent pour en faire [congés ?].
En exécution de tout quoi et de ce qui a été verbalement convenu.

M. Guillot vend par la présente purement, simplement et irrévocablement avec la garantie légale, clause d’investiture, de dévestiture*, requise à l’administration, du Conseil de fabrique de Chamoux pour la destination ci-devant énoncée, à l’acceptation des membres dudit Conseil [prénommés] les bâtiments de maison, grange, écurie cour, jardin, placiage et champ … qu’il a et possède rière cette Commune, figuré sous le numéro entier quatorze cent quarante-sept et partie du numéro douze cent dix-sept de la mappe locale, le tout de la contenance d’un journal et demi environ, sans [maintenue**] étant convenu que M. Guillot vend toute la portion du numéro douze cent dix-sept qui forme un carré au-dessous du bâtiment et jardin du Sr Mollot et du jardin du vendeur, jusques au verger du Sr Jean-Amédée Deglapigny qui le confine au levant, et qui est encore confiné au midi par une partie du même numéro restant au vendeur, au couchant par un chemin public, les treilles et jardin du Sr Théodule Plaisance et consort Revy, et au nord par la Cour, jardin et bâtiment du Sr Jean-Amédée Deglapigny et consort Plaisance.

Pour fixer irrévocablement la contenance vendue, il sera placé une limite à l’angle sud-ouest, du numéro quatorze cent soixante-six, appartenant à M. Deglapigny, et il sera établi une haie à frais communs entre le vendeur et les acquéreurs sur la ligne tirée de cette limite pour venir aboutir à l’angle nord-est du jardin du vendeur, et toute la portion au nord de cette haie fait partie de la présente vente.
M. Guillot renonce pour lui et les siens à tout passage sur l’immeuble vendu, tant pour l’investiture et dévestiture de l’autre partie du même numéro, que pour toute autre.
Il est convenu que d’ici dix ans, M. Guillot aura le droit de couper l’arbre noyer existant sur la pièce vendue, au-dessous de l’angle nord-est de son jardin et que jusqu’alors, le fruit restera à l’administration de la fabrique ; cependant, cette dernière aura la faculté d’exiger qu’il soit coupé plus tôt, et toujours le bois appartiendra au vendeur.
Il est encore convenu que l’on enlèvera le jeune arbre noyer existant dans la haie qui doit être transportée.
Cette vente est consentie et réciproquement acceptée moyennant la somme de sept mille cinq cents livres neuves que les acquéreurs en la qualité qu’ils agissent, promettent et s’engagent de payer au vendeur, savoir : six mille livres le premier Décembre mil huit cent quarante, et les quinze cent livres restantes le premier Décembre mil huit cent quarante et un, avec intérêts au cinq pour cent l’an, qui ont commencé à courir dès le premier mars dernier, époque à laquelle cette vente a été convenue.
Le vendeur promet faire jouir ladite administration dudit immeuble et lui cède au besoin le droit d’exiger la cense de la courante année.
Il est expressément convenu que si ladite administration veut [purger ?] l’immeuble vendu, elle le fera à ses frais, même s’il en est le cas, la rédaction de l’hypothèque légale de l’épouse du vendeur susdit. Et ne pourra sous aucun prétexte retarder le paiement dudit prix aux termes fixés.
Il sera délivré au vendeur, aux frais de ladite administration, une expédition du présent.
Le tout ainsi convenu et promis respectivement observer par les parties sous les peines et obligations de droit.
Dont acte, fait et passé et son contenu lu et prononcé à ma haute et intelligible vois auxdites parties, en présence du Sr François à feu Joseph Déplante et Antonin à feu Jean [Haillaud] cultivateurs, tous deux nés et domiciliés à Chamoux, témoins requis
."

* * *

Curieusement, les échanges qui suivent, entre la Fabrique de Chamoux et l'évêque, se trouvent consignés dans un minutier du notaire qui enregistra la vente, et ce ne sont pas des copies anonymes : les "mains" sont différentes, les textes sont signés.

"À Sa Grandeur l’Évêque de Maurienne,
Prince d’Aiguebelle

Supplie humblement le Conseil de fabrique de la Commune de Chamoux susdit :
Que par testament du 21 juin 1838 Ulliel notaire, dans les volontés duquel elle est décédée le 27 ( ?) du même mois, dame Marie Udry***, veuve Jayme a entre autres dispositions institué le Trésorier du Conseil de fabrique à la charge par lui d’établir au chef-lieu de Chamoux une école pour l’éducation des filles de la paroisse, et dirigée par une ou deux sœurs ou dames de St Joseph.
Qu’après le décès de ladite dame Jayme, il a fait procéder à l’inventaire de sa succession, en l’assistance du Sr Pierre Finas, curateur spécial, en conformité de l’art. 897 du Code Civil, ainsi que par acte du 27 juin 1838, Belleville notaire.
Que par acte [min.] au greffe du Tribunal de Judicature mage de Chambéry, le 3 7bre dernier, il a déclaré accepté ladite hoirie sous bénéfice d’inventaire, suivant le présent de l’article 986 dudit Code ; note de cette déclaration a été insérée au journal de Savoie du 8 dudit mois de septembre n° 36 en conformité de l’art. 1010.
Dès lors, il s’est présenté une occasion favorable d’accomplir les volontés de la testatrice. M. Guillot offre de vendre audit Conseil, une maison avec un Clos de la contenance d’un journal et demi environ, situé au chef-lieu de la Commune, dont la position paraît choisie pour l’établissement projeté ; il a purgé cet immeuble de toutes les hypothèques qui pouvaient exister, tant contre son vendeur que contre ses [auteurs] ; la position de fortune de M. Guillot dispense de remplir cette formalité à son égard ; en conséquence, ledit Conseil serait d’avis de faire l’acquisition dudit immeuble, et recourt
À ce qu’il plaise à Sa Grandeur, autoriser ledit Conseil
1°) à accepter la succession de ladite défunte dame Marie Udry Jayme,
2°) à faire l’acquisition de la maison sus désignée et du clos attigu****,
pour le prix de sept mille cinq cents livres qui sera payé des deniers de ladite succession, et ce, au besoin, en l’assistance dudit curateur spécial, et sur ce, daigner pourvoir.
Signatures, … Thomas, Petit, Plaisance, Ramel, … Bois
"

* * *

Cette supplique est suivie de 3 notes :

" Soit montré au Rd Promoteur. St Jean de Maurienne, 30 mars 1839. ☩ Alexis Évêque de Maurienne"

* * *

" Vu le testament de la Dame Udry veuve Jayme du 21 juin 1938, Ulliel notaire ; vu l’inventaire dressé par M° Belleville le 27 du même mois ; d’après les renseignements que nous nous sommes procurés, nous sommes d’avis que l’héritage de ladite Marie Udry peut être accepté, et l’acquisition de la maison de M. Guillot au prix énoncé dans la supplique, autorisée, toutefois sous les conditions ci-après, savoir :
1°) que le trésorier actuel de la fabrique de Chamoux institué héritier par la testatrice en sa dite qualité, consentira pour lui et ses successeurs audit emploi, à n’administrer les droits et avoirs de cette succession que de concert avec le conseil de fabrique, et s’engagera à ne jamais rien faire seul.
2°) que les avoirs de cette succession ne seront point confondus avec ceux de la fabrique ; qu’il en sera présenté chaque année un compte séparé, et qu’ils ne seront jamais employés que selon la destination qui leur a été assignée par la testatrice.
3°) que quoique cette institution soit faite à la charge d’établir au chef-lieu de Chamoux une école de filles dirigée par une ou deux sœurs de St Joseph, le montant de cette succession étant insuffisant pour faire cet établissement, le conseil de fabrique n’aura obligation de le former que lorsqu’il aura pu réunir les ressources nécessaires à cette fin, sans entendre rien prendre sur les revenus ordinaires de l’Église.
St Jean de Maurienne, le 30 mars 1839.
Billiet chanoine promoteur
"

* * *

" Soit montré au Rd Archiprêtre Recteur de Chamoux, au Conseil de fabrique dudit lieu, et spécialement au Sr Joseph Ramel, Trésorier, avec invitation de donner leur consentement aux conclusions du Rd Promoteur.
St Jean de Maurienne le 5 avril 1839
Alexis Évêque de Maurienne "

Puis nouveaux courriers :

" Nous soussigné archiprêtre Recteur de la paroisse de Chamoux, vu les conclusions du Rd promoteur au bas de la supplique présentée à sa Grandeur l’illustrissime et Révérendissime Évêque de Maurienne, Prince d’Aiguebelle, pour l’institution au chef-lieu de Chamoux d’une école de filles dirigée par deux sœurs de St Joseph, déclarons adhérer et consentir pleinement et irrévocablement aux susdites conclusions, selon toute leur teneur et acception.
Chamoux, 10 avril 1839
Bois, recteur
"

* * *

" Nous soussignés membres du Conseil de fabrique séant à Chamoux, vu les conclusions du Rd promoteur au bas de la supplique ci-contre, et le [Soit montré ?] et ordonné par Mgr Billiet illustrissime et Révérendissime Évêque de Maurienne, sous date du 3 avril 1839, déclarons adhérer et consentir pleinement  et irrévocablement aux susdites conclusions, et vouloir les observer à l’avenir dans toute leur teneur et acception.
Chamoux, le 10 avril 1839
Signatures : Bois Recteur, Thomas Petit Claude … Théodule Plaisance
"

* * *

" Je soussigné ; Trésorier actuel de la fébrique de Chamoux, institué héritier des avoirs de Marie Hudry veuve d’Antoine Jayme, par son testament du 21 juin 1838, et codicille du 24 juin même année, vu les conclusions du Rd promoteur au bas de la supplique présentée par le Conseil de fabrique à Sa Grandeur l’illustrissime et Révérendissime Évêque de Maurienne pour l’institution dans le chef-lieu de Chamoux d’une école de filles dirigée par les sœurs de St Joseph, déclare accepter les susdites conclusions et consentir pleinement et irrévocablement en ma qualité et pour mes successeurs à les observer et exécuter dans toute leur teneur.
Chamoux le 10 avril 1839
Joseph Ramel
"

* * *

(sic) « Le sus signé observe à Sa grandeur que si on fait l’acquisition de ce local de suitte, et qu’il ne soit pas occupé par les sœurs, on sera obligé de le louer a pure perte, par ce l’objet ne peu produire qu’un revenus annuel de 200♯ et qu’avant d’y instaler les sœurs, il faudra faire une dépense y compris le mobilier au moins de 2000♯ non compris les différents legs portés par le codicile que vous avez vu, et je crois pour ma propre satisfaction vous faire ces observations en acceptant les 3 articles de monseigneur le promoteur, vous priant de m’excuser. Joseph Ramel »

* * *

" Alexis Billiet par la miséricorde divine et la grand. du St Siège Apostolique, Évêque de Maurienne, Prince d’Aiguebelle, Commandeur de l’Ordre des SSts Maurice et Lazare,
Vu la supplique à nous présentée par le Rd Recteur et le Conseil de fabrique de la paroisse de Chamoux, notre décret de … … du 30 mars dernier, les conclusions du Rd Promoteur du même jour, autre décret de [Soit montré ?] au conseil de fabrique de Chamoux du 5 avril et les réponses du Rd Archiprêtre, Recteur dudit lieu, celles des fabriciens et dudit Joseph Ramel, receveur de la favrique, du 10 du courant, vu aussi le testament de la Dame Hudry Vve Jayme du 21 juin 1838, Ulliel notaire, son codicille du 24 juin, même notaire, et l’inventaire de son délaissé du 27 juin 1838, Belleville notaire, nous autorisons le Conseil de fabrique de Chamoux en ce qui nous concerne, à accepter la succession de la Dame Hudry, sous les clauses et conditions énoncées par le Rd Promoteur, savoir :
1°) que les questions relatives à l’administration de ladite hoirie ne pourraient être traitées que par le Conseil de fabrique dument assemblé, et non par le receveur seul, à teneur du consentement donné par le Sr Ramel par sa réponse ci-jointe du 10 courant.
2°) que les avoirs provenant de cette succession seront toujours employés selon la destination qui aura été assignée par la testatrice, qu’ils ne seront point confondus à ceux de la fabrique, et qu’il nous en sera présenté chaque année un compte distinct et séparé.
3°) que quoique cette institution héréditaire soit faite à la charge d’établir à Chamoux une école de filles dirigée par les sœurs de St Joseph, les avoirs de ladite succession étant insuffisants pour former un tel établissement, la fabrique n’y sera obligée que lorsqu’elle pourra trouver les ressources supplétives nécessaires à cette fin, sans entendre rien prendre pour cela sur les revenus ordinaires de l’Église.
À ces conditions, nous avons approuvé et homologué, et par les présentes nous approuvons et homologuons en ce qui nous concerne, le testament et le codicille précités de ladite Dame Hudry, dans sa forme et teneur.
4°) et comme la maison que le Conseil de fabrique a l’intention d’acheter de M. Guillot se trouve placée dans une situation tout à fait favorable pour l’établissement dont il s’agit ; qu’il n’y aurait pas espoir d’en trouver une autre à Chamoux aussi convenable à cette fin, si on laisse échapper cette occasion, nous autorisons ledit Conseil de fabrique à en faire l’acquisition au prix proposé de sept mille cinq cents livres à payer des deniers de la succession.
Nous ordonnons que le testament de la Vve Jayme, son codicille, l’inventaire de ses avoirs, la supplique qui précède, nos deux décrets de [Soit montré ?], les conclusions du Rd Promoteur, les réponses du conseil de fabrique et notre présent décret, soient transcrits en entier au Registre de notre Chancellerie.
Donné à St Jean de Maurienne, le 18 avril 1839

Alexis Évêque de Maurienne"

Les petites chamoyardes allaient donc avoir LEUR école, fin 1839 - mais à quel prix ! enlightened

Recherche et transcription 12-2013 A. Dh.


Notes
* Dévestiture : en Suisse, desserte d'un accès, d'un lieu (Larousse). Dépossession. La dévestiture d'une charge, d'un bénéfice. (Littré)
** Confirmation par jugement dans la possession d'un bien ou d'un droit.
*** selon les textes, on trouve Udry ou Hudry, et Jaime ou Jayme !
**** attigu : contigu, attenant


Sources
ADS. Minute de Maître Belleville, Notaire, 1839, (6E 11692) page 239 et suivantes  pour la vente, page 243 et suivantes  pour les échanges avec l'évêché.